A MORT LE FOOT (Pierre Desproge)
Voici bientôt quatre longues semaines que les gens normaux subissent à longueur d'antenne les dégradantes contorsions manchotes des hordes encaleçonnées sudoripares qui se disputent sur gazon l'honneur minuscule d'être champions de la balle au pied.
Voilà bien la différence entre le singe et le footballeur. Le premier a trop de mains ou pas assez de pieds pour s'abaisser à jouer au football.
Je vous hais, footballers. Vous ne m'avez fait vibrer qu'une fois : le jour où j'ai appris que vous aviez attrape la chiasse mexicaine en suçant des frites aztèques. J'eusse aimé que les amibes vous coupassent les pattes jusqu'à la fin du tournoi. Mais Dieu n'a pas voulu. Ça ne m'a pas surpris de sa part. Il est des vôtres. Il est comme vous. Il est partout, tout le temps, quoi qu'on fasse et où qu'on se planque on ne peut y échapper.
Quand j'étais petit garçon, je me suis cru longtemps anormal parce que je vous repoussais déjà. Je refusais systématiquement de jouer au foot à l'école ou dans la rue. On me disait : Ah, la fille ! ou bien Tiens, il est malade, tellement l'idée d'anormalité est solidement solidaire de la non-footballité.
Je vous emmerde. Je n'ai jamais été malade. Quand à la féninité que vous subodoriez, elle est toujours en moi. Et me pousse aux temps chauds à rechercher la compagnie des femmes. Y compris celle des vôtres que je ne rechigne pas à culbuter quand vous vibrez aux stades.