Elément de réponse que j'avais posté il y'a presque un an :
Allez un petit coup de pouce pour le culturisme, c'est bien ca qu'il faut dire non ?
En un siècle de jazz, les instruments ont évolué- la batterie fut même créée- et naturellement au fil des époques, des styles, leur rôle et leur importance a changé. La basse peut-être, plus que les autres, a vu sa place s'affirmer au cours du temps.
Le piano, la trompette ou le saxophone ont peu ou pas évolué ; ni par leur rôle au sein de l'orchestre, ni "physiquement" contrairement à la Basse qui est passée du Tuba à la Contrebasse et qui a vu apparaître la Basse électrique. Son statut, de soutien harmonique et rythmique, est devenu un instrument au fil du temps de plus en plus soliste.
A la nouvelle Orléans, les premiers orchestres utilisaient une contrebasse à vent : le Tuba ou parfois uniquement un Trombone. C'étaient alors des "spasms band", ou des "brass band" proche finalement des harmonies ou "cliques" que l'on connait, et qui jouaient en se déplaçant. Ils accompagnaient des cérémonies au cimetière, carnavals etc. et très vite furent invités pour animer des bals, des événements sportifs, ou jouer dans des parcs (Buddy Bolden au Lincoln Center en 1905).
La Contrebasse se joue encore à l'archet pour ressembler davantage aux notes plus longues du Tuba.
On dit que c'est BILL JOHNSON qui vers 1911 introduisit la technique (dans cette musique) de pizzicato après avoir cassé son archet lors d'un concert.
Et jusqu'à la fin des années 20, les deux techniques seront utilisées. Le slap, (la corde vivement tirée vient frapper la touche) également utilisé par BILL JOHNSON, POP FOSTER, ou WELLMAN BRAUD (D.Ellington) ajoute un effet parfois percussif.
Le rôle premier de la Contrebasse fut de soutenir la pulsation tout en soulignant l'harmonie ne jouant que les fondamentales des accords.
Jusque dans les années 30, le Tuba reste présent et quelques musiciens (tubistes) hésitent à franchir le pas.
ALCIDE PAVAGEAU "slow drag" attendit 45 ans avant d'adopter la Contrebasse (avec G. Lewis et Bunk Johnson), comme HAYES ALVIS qui joua du Tuba (avec J.R. Morton) avant d'adopter la Contrebasse en 1930 avec D.Ellington et L.Armstrong.
Le pas à franchir n'est pas non plus facilité par les souhaits des ingénieurs du son. Ainsi pour l'enregistrement d'un disque du CREOLE JAZZ BAND du cornettiste King Oliver, il est demandé à Baby Dodds de ne pas utiliser la grosse caisse et la caisse claire pour éviter les effets de saturation.
Quant au Contrebassiste BILL JOHNSON, on lui demande de... ne pas jouer!
En effet, à cette époque, dans les studios, on préfères encore les basses à vent (Tuba ou Sax Basse) et lors de séances ultérieures, le CREOLE JAZZ BAND fera appel à un Saxophone Basse.
Aussi réputé que WELLMAN BRAUD (D.Ellington), le Contrebassiste Neo Orléanais "POPS FOSTER" utilisant abondamment le slap et doté d'un tempo sûr pour un accompagnement puissant est reconnu comme le "père" de la Contrebasse de cette période et fut surnommé dans les années 20 "all time bassist".
Il est aussi l'un des premiers à se faire apprécier en soliste notamment aux cotés de Bunk Johnson, L.Armstrong et Freddie Keppard.
Dans les années 30, l'archet est progressivement abandonné au profit du pizzicato, plus précis pour le marquage du tempo.
Le slap est lui aussi délaissé et les lignes de basse deviennent de plus en plus mobiles. En effet, l'arrivée du "swing" marque le passage vers une section rythmique plus souple et plus raffinée.
WALTER PAGE leader des Blues Devils (dont le pianiste est William Basie) de Kansas City joue avec une mobilité qu'ignoraient les Neo Orléanais.
Dès lors, l'accompagnement ne se résume plus seulement à jouer (doublées ou pas) les fondamentales et les quintes, mais à jouer une ligne mélodique qui se "promène" sur l'harmonie : la "walking bass".
Se fondant dans ce que l'on appelle "the all American Rythm Section" (avec Freddie Green, Count Basie, et Jo Jones) au sein du big band du Count, il exercera une forte influence et sera un rythmicien de référence pour les orchestres Swing.
Jo Jone rapport en effet que ce fut PAGE qui lui appris vraiment à jouer à Kansas City un 4/4 régulier.
Le "pendant" New Yorkais de WALTER PAGE est l'ancien Tubiste JOHN KIRBY maintenant contrebassiste chez Chick Webb et Fletcher Henderson (1936). Son jeu puissant et audacieux dans les années 30 contribue à l'émancipation de la Contrebasse. A cette époque les cordes sont alors attaquées avec toute la main (sauf le pouce).
Un du premier soliste reconnu comme tel à la contrebasse est SLAM STEWART. Associé à Slim Gaillard (dans le duo Slim & Slam) et accompagnateur d'Art Tatum et Coleman Hawkins, il devint célèbre pour doubler ses solos (à l'archet) en chantant (fredonnant) les notes à l'octave supérieure.
Un de ses disciples, MAJOR HOLLEY, lui aussi ancien tubiste (et violoniste) compagnon de route de Oscar Peterson et Dexter Gordon, privilégie le jeu à l'archet et double vocalement en voix de basse les phrases qu'il exécute.
Cette révolution de simple accompagnateur vers un rôle de plus en plus soliste du contrebassiste est à rapprocher de l'évolution technique de l'instrument. C'est en effet en 1930 que les cordes métalliques remplacent peu à peu les cordes boyaux. Elles autorisent désormais une plus grande précision (et justesse), et donc une meillre exécution.
Malgré comme on l'a vu, quelques audaces, les contrebassistes se confinent toujours pour la plupart, à assurer un rôle d'accompagnateur rythmique et harmonique très cadré : jeu en noires et souvent "pompe" tonique / dominante.
C'est alors qu'un jeune contrebassiste de 21 ans est engagé par Duke Ellington de passage à St Louis à l'automne 1939. Ce jeune homme sans qui "la contrebasse ne serait pas ce qu'elle est" est JIMMY BLANTON. Il fut à la Contrebasse ce que Coleman Hawkins fut au Sax ténor ou Charlie Christian à la Guitare moderne.
Il donne à son instrument une nouvelle dimension, une nouvelle place ; il émancipe la Contrebasse.
Il a su en faire un instrument d'improvisation mélodique égal d'un "soufflant" qui peut s'assumer seul.
Accompagnateur de génie pendant 2 ans chez Ellington grâce à un jeu souple et puissant. Sa technique lui permet d'optimiser la résonance naturelle de la corde en utilisant au maximum de chair de ses doigts (main droite) qui restent parallèles aux cordes. Ce son si distinct et prononcé lui permet de jouer, au contraire du pizzicato d'alors, des doubles croches comme des noires.
La richesse de ses solos toujours mélodiques et l'accompagnement qu'il sait rendre stimulant pour les solistes, font de JIMMY BLANTON l'élément de référence du nouveau son de la Contrebasse. Si l'orchestre du Duke, fin des années 30, est considéré comme le meilleur qu'il ait eu, c'est en grande partie grâce à son contrebassiste qu'il le doit.
La batterie ne jouant plus basiquement les 4 tempos, la "walking bass" fait enfin entendre ses motifs mélodiques.
Attaquant la corde avec un ou deux doigts (puis avec les 4 doigts de la main droite), le contrebassiste acquiert une vitesse d'exécution qui lui permet de suivre les temps rapides (et ultra rapides) des Boppers.
Par ailleurs, les enrichissements harmoniques du Be-bop leur ouvraient des perspectives mélodiques nouvelles. Dans la ligne droite de son prédécesseur JIMMY BLANTON, à qui il voue une profonde admiration, OSCAR PETTIFORD s'affirme d'emblée comme le premier grand contrebassiste du Bop.
Il fait partie des premières séances s'enregistrement avec Dizzie Gillepsie, après avoir déjà travaillé (à 20 ans!) dans les orchestres de Ch.Barnet, L.Hampton, et Roy Eldridge et ici avec Art Tatum et Billie Holiday.
Il a joué un rôle fondamental dans le développement de la Contrebasse.
Technicien incontesté, mais aussi musicien raffiné et complet, ayant une connaissance profonde de l'harmonie, il étudia le Piano puis le Violoncelle qu'il utilisa surtout en pizzicato.
Il devint le successeur de JIMMY BLANTON chez Ellington. Le Duke avait enregistré des duos avec Blanton, il enregistra des quartettes avec OSCAR PETTIFORD.
Même si HARRY BABASIN fut le premier violoncelliste de jazz, ce fut OSCAR PETTIFORD qui assit la position du Violoncelle dans le jazz.
Le passage des sons profonds de la Basse au registre supérieur du Violoncelle paraissait une conséquence logique de l'évolution de la Basse qui s'instrument harmonique devenait instrument mélodique.
Il eu depuis lors d'autres bassistes qui choisirent le Violoncelle comme instrument secondaire (Dough Watkins et Ron Carter) jusqu'à ce qu'il devienne un instrument de jazz à part entière.
OSCAR PETTIFORD est considéré comme le premier grand contrebassiste "moderne" (après le "swing" de J.Blanton mort à 23 ans).
Soliste mélodique et accompagnateur qui se plaisait à "raconter une histoire", c'est aussi un compositeur inventif qui laisse des morceaux de référence du répertoire de Contrebasse comme Laverne walk ou Tricotism.
A partir du Bop, les contrebassistes ne marquent plus l'imperturbable tempo continu souvent joué par 4 noires par mesures dont la première est obligatoirement la fondamentale de l'accord.
On note l'emploi de plus en plus fréquent de triolet de croches et des "ghosts notes".
La technicité, la rapidité et les audaces harmoniques des Boppers font désormais des contrebassistes des instrumentistes égaux d'un saxophoniste ou d'un trompettiste.
RAY BROWN est un de ceux-là. "gardien" du tempo, c'est un adepte du gros son avec une égale intensité dans le grave et dans l'aigu.
Un swing irréprochable quel que soit le tempo et des lignes de basses claires et précises font de lui l'un des plus grands contrebassistes des sections rythmiques du jazz.
Il participa aussi à de nouvelles expériences (en jazz) pour définir un autre rôle de la Contrebasse. Vers la fin des années 40, il enregistra pour D.Gillepsie et son grand orchestre un concerto pour basse : "one bass hit". Expérience qu'il renouvellera plus tard avec le pianiste arrangeur californien Marty Paich.
Enregistrement qui contient également un titre en solo non accompagné, comme le Sax ténor de Coleman Hawkins sur "Picasso".
Ce mouvement (le Bop) eut pour effet de stimuler chaque musicien voulant être accepté dans la communauté.
Le travail était basé sur le son : comment trouver l'ampleur, la dynamique et l'homogénéité du son pour ces petites formations (trios,quartettes,quintettes).
L'autre point était la nouvelle place (le nouvel impact) à donner aux improvisations qui ne pouvaient être médiocres sous peine d'être "éjectés" de ces joutes musicales.
Les contrebassistes, même s'ils gardent leur fonctions métronomiques (comme la continuité de la cymbale ride) et assurent les tempis soutenus sans perdre du volume sonore, sont désormais nécessairement souples et vigoureux, capables d'autorité rythmique et d'intuitions harmoniques.
Ces nouvelles voies du jazz seront pleinement explorées par un grand contrebassiste/compositeur révélé ces années-là : CHARLES MINGUS.
"Prends donc une basse, MINGUS. Tu es noir. Aussi doué que tu sois, tu ne feras jamais rien de bon dans la musique classique. Tu veux jouer, il faut que tu joues d'un instrument noir. Jamais tu ne feras slapper un Violoncelle, apprends donc à slapper la basse".
Voilà coment CHARLES MINGUS débuta la Contrebasse, après avoir quitté l'orchestre classique (et le violoncelle) du Collège.
Ancré dans la tradition noire américaine - élevé au Blues et aux incantations des "preachers" - (il joua avec kid Ory et Louis Armstrong), il se tournera au milieu des années 50 vers une musique expérimentale sous forme d'ateliers ("jazz workshop", qui seront des lieux d'improvisations collectives, d'agitation, de dynamitage des formes.
Sa contrebasse sera l'instrument de son combat d'homme libre.
Les années 50 voient une nouvelle génération de Contrebassistes héritiers de RAY BROWN et d'OSCAR PETTIFORD, ayant pour chefs de file PAUL CHAMBERS et RED MITCHELL.
Le premier, après avoir joué du tuba et du Sax Baryton, enregistre avec Winton Kelly, Red Garland et Philly Joe Jones.
Considéré comme le plus doué et l'un des plus déterminants de cette génération, héritier de JIMMY BLANTON.
Rival de RED MITCHELL, PAUL CHAMBERS est incomparable dans ses accompagnements de solistes : tempo et musicalité parfaite, capable de "remplacer" une main gauche de pianiste.
Il possède une attaque précise et une sonorité plutôt grave sans être diffuse. C'est un des maîtres des solos à l'archet, toujours mélodiques, et son phrasé évoque beaucoup la vigueur et la richesse d'un Sonny Rollins (J.E.Berendt).
C'est sans hésitation que le Mr PAUL CHAMBERS est considéré comme LE soliste du mouvement Bop.
RED MITCHELL, quant à lui, accordant sa contrebasse en quinte comme un Violoncelle, développe un phrasé également proche d'un Sax et tente souvent par ses audaces mélodiques de déjouer les clichés de la "Walking bass".
Vingt ans après la révolution de J.BLANTON, un autre génie va donner un élan décisif à la Contrebasse morderne.
SCOTT LA FARO, qui ne débute la Contrebasse qu'à 17 ans, après avoir étudié la Clarinette et le Sax Tenor, va dans la lignée de BLANTON, PETTIFORD ou MINGUS élever la Contrebasse au rang d'instrument mélodique à part entière.
Capable de jouer les 4 temps à des tempis ultra rapides (technique main droite proche de la guitare classique : alternance de 4 ou 5 doigts). Il créa des possibilités nouvelles non par refus de la tradition mais par une maîtrise supérieure de celle-ci.
Il montre (notamment au sein du trio de Bill Evans) que le tempo n'a pas nécessairement besoin d'être marqué de façon continue mais peut être suggéré dans un dialogue avec le soliste.
Il affectera par ses "compositions simultanées" non seulement le trio de B.Evans mais aussi "le son" de tout trio jazz.
Sans jamais vouloir s'accaparer le devant de la scène (et renier son rôle d'accompagnateur) ses accompagnements et ses solos, d'une virtuosité et d'une vélocité époustouflante, feront dès lors de la Basse, une "nouvelle voix mélodique" (Dave Holland).
L'influence laissée par SCOTT LA FARO est immense et une nouvelle génération de contrebassiste apparaît.
Tout d'abord ses successeurs au sein du trio de B.Evans : CHUCK ISRAEL, EDDIE GOMEZ, GARY PEACOCK poursuivront cette émancipation avec bonheur.
Désormais, la Contrebasse s'impose par sa liberté rythmique, un recours fréquent aux extensions des accords, à l'usage des doubles notes et des harmoniques (G.Peacock).
C'est également chez EDDIE GOMEZ, l'utilisation fréquente du registre aigu, une main gauche qui "travaille" la note et en accompagnement le recours aux pédales harmoniques.
On peut dire que cette génération, fait des années 60, l'âge dor de la Contrebasse qui se dégage d'une partie de ses obligations rythmiques devenant un réel instrument leader.
L'aventure moderne de la Contrebasse va se poursuivre dans les années 70 avec un "nouveau genre" de Contrebassistes, bien sur virtuoses, mais plus seulement techniciens ou accompagnateurs génieux et solistes époustouflants mais plutôt des "créateurs d'univers sonores" (Philippe Baudoint).
Ils font le pont entre la tradition et les expériences free de ces années-là, ils accompagnent pour beaucoup le "second souffle" de Miles Davis et prennent (pour certains) le train de la fusion.
Un des représentants de cette transition est RON CARTER. 500 disques en accompagnateur, de Bill Evans à Steve Kuhn ou de Cannonball Adderley à Billy Cobham, il est le contrebassiste le plus enregistré du Jazz.
Même s'il s'est peu intéressé au langage binaire et électrique il est le "passeur" de référence de cette évolution, notamment losqu'en 1963, il entre dans le quintette de M.Davis ou, avec Herbie Hancock et le jeune batteur Tony Williams (18 ans), il forme une section rythmique devenue légendaire.
Capable de s'exprimer sur le Violoncelle (en 1961 avec Eric Dolphy) ou la Basse piccolo, ce poly instrumentiste (Tuba, Clarinette, Violon, Guitare, Trombone!), par sa technique extraordinaire et sa conception particulière du balancement, influencera bon nombre de bassistes à venir (même éloignés de son esthétique).
S'exprimant dans plusieurs univers musicaux CHARLIE HADEN est une "autorité" musicale.
Gros son dans un registre plutôt grave, c'est avant tout un mélodiste qui ne cesse de voyager musicalement et géographiquement. Compagnon d'Ornette Coleman il vient en Europe pour un duo de Contrebasse (1968 avec David Izenson). Puis le duo devient un Liberation Music Orchestra, avant que le soliste collabore à une musique de film italien.
En Californie il joue avec Ernie Watts ou le guitariste-pianiste brésilien Egberto Gismonti.
Dans les années 80, il échange des notes avec un guitariste portugais, un bandonéoiste ou un clarinettiste français (M. Portal).
Il sait tout chanter avec pudeur ou passion, des nostalgies hollywoodiennes (avec son Quartet West), aux chants militants et politiques (espagnols, latino-américains et sud-africains).
STANLEY CLARKE( ), aussi virtuose à la Basse qu'à la Contrebasse est l'un de ceux qui ont fait le grand écart "accoustique-électrique" et les aller-retours "tradition-fusion".
Il a encadré sa carrière de bassiste exemplaire du jazz Rock (C.Corea) par un début chez H.Silver ou J.Henderson et un retour à la fin des années 80 au jazz avec W.Shorter ou E.Elias.
Les nouvelles perspectives sonores ouvertes par le free jazz ; les développements technologiques avec l'explosion de la guitare électrique ; les nouveaux modèles de piano électrique (et l'apparition en 1965 du "suitcase piano" de H.Rhodes) ; ainsi que l'impact des "musiques cousines" : la soul musique, le Rythm & Blues, le rock, font que la "grand-mère" a du mal à se faire entendre.
Aussi malgré quelques essais d'amplifications de la Contrebasse dans les années 40, il faut attendre 1951 pour qu'un luthier, Leo Fender, commercialise la première Basse électrique (la Precision Bass).
L'un des premiers à l'utiliser est MONK MONTGOMERY aux côtés de son frère Wes ou de Lionel Hampton.
Et malgré une plus grande souplesse technique d'utilisation (sonorisation aisée, changement du son et du volume par des potentiomètres) et une facilité indéniable du transport, elle ne sonne pas "humaine" mais trop impersonnelle et trop "technique". La Guitare Basse électrique est donc encore réservée à la Soul music et au Rock (J.Jamerson, Larry Graham).
Il faut donc attendre un remarquable contrebassiste à l'imagination lyrique qui franchira le pas : STEVE SWALLOW.
Dans un style guitaristique (il joue au médiator), il fait l'idéale transition de l'accoustique à l'électrique.
En faisant chanter ses accompagnements et ses solos, en retenant son énergie, il est le premier à avoir inventé un langage spécifique pour cet instrument hybride.
Il joue sur le fil du rock et du jazz, du rythme et de la mélodie, de la Guitare et de la Contrebasse.
Dans les années 70, le Rock dépasse ses fondements simplistes et le jazz cherche de nouvelles voix rythmiques et sonores.
Les deux mouvements vont se rencontrer donnant le "jazz rock" où la Basse électrique tient un rôle essentiel.
La qualité de reproduction du son permet maintenant une intelligibilité sur toute l'étendue de l'instrument et à différents volumes.
L'adjonction d'effets sonores : écho, reverb, wha wha etc... ainsi que l'évolution de la technique instrumentale (la Basse électrique a maintenant 20 ans) amèneront souvent le bassiste électrique à jouer un rôle de soliste.
Un de ceux-là est JACO PASTORIUS, génial précurseur révolutionnaire de la Basse fretless (basse sans frettes).
Sa forte personnalité, sa virtuosité l'identifie sans équivoque et le place toujours au premier plan, devant la rythmique, au même niveau que les autres solistes.
Une attaque incomparable, un son médium d'une présence brute, des traits en double croches avec notes éttoufées, un vibrato et un phrasé mélodique imprévisible, une connaissance parfaite des harmoniques, font qu'il transcende tout ce qu'il accompagne.
Une chanteuse : Joni Mitchell, un Guitariste : Pat Metheny, un groupe : Wheater Report, un orchestre : Birthday concert.
Avec JACO PASTORIUS, la Basse électrique a atteint (comme avec LA FARO pour la Contrebasse) une maturité et une envergure que rares seront les bassistes qui ne seront "touchés" et influencés par lui.
Les années 70, si elles sont l'avènement de la "fusion" jazz-rock, n'en restent pas moins des années d'expérimentation héritières du free jazz de la décennie précédente.
Libérés des consignes harmoniques, les contrebassistes proposent davantage d'intéraction avec les solistes où parfois, dans des contextes sans pulsations, fournissent un accompagnement d'intéractions non prédéfinies.
Certains travailles davantage le matériau sonore (suraigu à l'archet, caisse frappée etc...), d'autres s'associent (duos ou quatuors de contrebasses), d'autres enfin "passent et repassent" de la Basse à la Contrebasse : MIROSLAV VITOUS et DAVE HOLLAND.
Enfin certains recherchent d'autres voix, d'autres "terrains pour jouer", ils recherchent pour avancer, des métissages.
Le contrebassiste Danois NEILS HENING HORSTED PEDERSEN (NHOP) résume la situation ainsi : "La Basse est devenue un instrument de plus en plus indépendant... ce qui me plait aujourd'hui, c'est ce que l'on a dépassé le point où on se heurtait à des difficultés techniques ; il n'y a plus de raison de se laisser impressionner par quoi que ce soit, il suffit de faire de la musique..." Ainsi beaucoup de Bassistes s'intègrent parfois dans plusieurs camps stylistiques.
Jazz et Rock comme on l'a vu, mais aussi Jazz et Funk (JAMALADEEN TACUMA), Jazz et Rythmiques indiennes (D.DI PIAZZA) ou africaines (RICHARD BONA), Jazz et musiques caribéennes (ANDY GONZALES), les "bruitistes" se revendiquant d'un Jazz-Punk (BILL LASWELL), Jazz et musiques contemporaines (JOELLE LEANDRE), Jazz et traditions (CLAUDE TCHAMITCHIAN).
Le jazz a transformé la Basse de l'orchestre symphonique en une voix instrumentale mélodique.
Même si elle assume toujours son rôle de "fondation" elle n'est plus "souteraine".
Elle a acquis les qualités qu'OSCAR PETTIFORD jugeait indispensables : "humanité,expressivité, affectivité et aptitude à raconter elle aussi une histoire".
Aussi pourquoi refuser, opposer des styles, des mouvements qui ont constitué et fait évoluer le Jazz ("Ancien contre moderne", accoustique contre électrique etc...) et donc le rôle des instruments et en particulier la Basse dans le jazz.
Tout mouvement musical ou/et artistique s'enrichit de ses propres expériences, de ses avancées, de ses retours en arrière, de ses excès. Du Tuba, la Basse électrique 8 cordes, le but de cette évolution de la Basse sur un siècle de Jazz n'est-il pas finalement, comme le souhaitait RAY BROWN de "rendre le musicien (le tubiste, le Contrebassiste, le Bassiste électrique) plus libre de faire entendre son battement de coeur".
Le premier article que j'ai lu avant de me mettre à la basse. C'est un peu long mais tout bassiste qui se respecte se doit au moins de savoir ca . Et pour ceux qui n'aiment pas le jazz... je ne peux plus rien faire pour vous .